Le présent n'est que le futur passé...
7 Avril 2007
Chers lecteurs, chers étudiants, chers passionnés numériques.
Le groupement Renaissance Numérique vient de publier un Livre Blanc: "2010 l'Internet pour tous"
http://www.renaissancenumerique.org/
J’ai immédiatement salué cette initiative heureuse qui faisait entrer dans le débat politique un peu de modernité. Sur la base d’extraits de l’excellent article de Estelle Dumout, du web journal ZDNet et de mon argumentation je vous propose une critique constructive de ces propositions et vous appelle à réagir en proposant à votre tour des pistes de réflexion. Mon propos n’est absolument pas polémique, c’est plutôt un éclairage qui s’adresse à vous, futurs acteurs du numérique.
« Car leur constat se veut alarmant: «Le baobab qu'est le développement du haut débit est l'arbre qui cache le reste», affirme François Xavier Hussherr, directeur associé au Benchmark Group et président de Renaissance Numérique. «La France est très en retard sur ses voisins européens, avec seulement 57% des foyers équipés de PC et à peine plus de 40% connectés à internet.»
Chaque veille électorale est suivie « d’oracles catastrophistes » qui prédisent notre déclin pour mieux se faire entendre. Ce n’est pas en tirant la sonnette d’alarme que l’on fait avancer un train. Je ne sombrerai donc pas dans cette vision assombrie de l’Internet français. Les chiffres de l’équipement et de la connexion ne sont pas catastrophiques et se situent dans une bonne moyenne.
Je rassure les étudiants, il n’y a pas de prix international de la connexion haut débit et aucun pays ne devient la « Nouvelle Star » de l’Internet. L’équipement d’un pays dépend de son histoire, de sa culture, de sa géographie, de son pouvoir d’achat et des choix politiques. Notre pays est vaste avec une très faible densité de population et seulement trois grosses villes. Vous vous doutez bien que les petits pays du Nord, l’Allemagne et dans une moindre mesure la Grande Bretagne ont plus de facilité à équiper plus de monde.
Ensuite un taux d’équipement ne veut strictement rien dire, c’est l’accessibilité à la maison, au bureau, à l’école qui est important. Enfin l’équipement se fait au niveau d’un foyer et non pas au niveau de l'individu comme pour le téléphone portable. Un même foyer équipé pourra ainsi permettre aux parents, enfants et grands parents de se connecter.
Leur ambition est, à l'horizon 2010, de faire passer ces deux taux à 80%. À cette fin, ils ont donc rédigé quinze propositions, qu'ils ont soumises à tous les candidats à la présidentielle. «Nous sommes attristés que l'internet soit absent du débat politique», poursuit-il. «Les questions se cristallisent sur le logiciel libre, sur la loi Dadvsi, sur les cocoricos en matière de haut débit: tout cela est important, mais ce n'est pas cela qui fera que les gens vont se connecter», martèle François Xavier Hussherr.
Ce chiffre sera presque naturellement atteint si l’on examine la courbe exponentielle de l’équipement. Les Français ont un tic qui énerve, à l’inverse des Britanniques, ils s’équipent tardivement mais massivement. Ce n’est pas une attitude stupide car en fait cela leur permet de disposer d’une technologie fiable et éprouvée. Dans les années 90, ce procès était déjà de rigueur devant la faiblesse de l’équipement informatique des ménages. En fait lorsque la France s’est équipée, elle l’a fait avec des PC multimédia plus facilement connectable à internet. Pour ma part, je pense que l’équipement adsl sera rapidement atteint en revanche il est encore temps de penser à l’après et d’accélérer l’équipement en Ultra Haut débit.
Mettre l'accent sur le recyclage des PC.
S'inscrivant dans la tendance écolo du moment, Renaissance Numérique mise, par ailleurs, sur le recyclage des PC. «Sur cent ordinateurs jetés par les particuliers et le secteur public ou privé, 50% peuvent être reconditionnés et revendus à un prix d'environ 99 euros», souligne Christophe Parcot, directeur général de Yahoo France. Diverses associations travaillent déjà en ce sens, mais les patrons français proposent de créer une «journée PC Don», pour sensibiliser les Français. Ils estiment que 1,8 million de foyers par an pourraient être équipés par ce biais.
Voici une mesure très originale rapide et peu coûteuse à mettre en œuvre. L’économie solidaire pourrait y trouver un rôle efficace d’intégration des citoyens isolés. Les grands groupes de distribution comme FNAC avec les filiales Surcouf et Conforama ainsi que DARTY pourraient être des acteurs efficaces de ce recyclage. Ils pourraient se constituer en GIE, c’est très rapide à mettre en œuvre.
Suite logique de ce programme, la formation aux nouvelles technologies: d'une part dans les entreprises, les TPE en particuliers; d'autre part à l'école et à l'université. Dans ce domaine, la plupart des mesures avancées reprennent des initiatives existantes, et prévoient simplement leur extension. Le club de réflexion envisage ainsi de former les élèves dès le primaire, car désormais «il faut savoir se servir d'un ordinateur et d'Internet, en plus de savoir lire et écrire».
Vous connaissez mon point de vue à cette analyse, on n’apprend pas l’informatique, on s’en sert cela n’est pas pareil. L’usage en classe de logiciels de traitement de texte, de tableur, l’allègement des livres scolaires au profit de la recherche documentaire numérique, le travail collaboratif en groupeware, la généralisation de la communication numérique entre élèves et enseignants sont des pistes à explorer et à développer.
Un ministre des nouvelles technologies ?
Autre revendication de poids, déjà en cours de réalisation: «développer des partenariats public/privé pour permettre la couverture en haut débit des zones économiquement non rentables». L'Idate (Institut de l'audiovisuel et des télécoms en Europe) a justement rappelé récemment que la France se distinguait dans le paysage européen par «l'ampleur des initiatives des collectivités territoriales», en la matière.
Il est illusoire de penser que l’équipement numérique des régions isolées va relancer leur économie au moment même ou la poste ferme des bureaux. Dans les années 2000, il était de bon ton d’imaginer le télétravail et le travail à la campagne. 10 ans après, comme des moules sur leur piquet, les agences de com et les entreprises de technologies s’agglutinent dans le 92, quel exploit !
Les patrons de l'Internet aimeraient qu'une évaluation des initiatives soit réalisée pour mettre en lumière les exemples à suivre. Ils réclament par ailleurs la multiplication des bornes Wi-Fi dans les lieux publics, à l'image du projet Paris Ville Numérique.
Mais quel est l’intérêt de ces « patrons » du net à voir se multiplier les internautes ? Même si je milite aussi de mon coté pour une large diffusion, je crains de ne pas avoir les mêmes raisons. Je pense que ce qui est visé dans cette démarche est l’augmentation du nombre de consommateurs en ligne. Si le nombre de consommateur en ligne augmente, est ce par création de nouvelles richesses ? Ou par le simple transfert d’une consommation physique vers une consommation virtuelle ? En période de tension sur les salaires, de faible pouvoir d’achat, de vieillissement de la population, ce pari est risqué. En revanche, l’aide à la création d’entreprise dans les TIC s’est tarie avec l’explosion de la bulle Internet en 2000, c’est certainement cette piste là qu’il faudra développer dans l’avenir.
Le coût total de l'ensemble de leurs propositions, chiffré par Renaissance Numérique, paraît peu réaliste: environ 100 millions d'euros.
Dernière analogie avec le pacte écologique: comme Nicolas Hulot, le club de réflexion demande la nomination d'un ministre dédié à leur secteur, nommé auprès du Premier ministre. Il serait chargé de coordonner l'action publique pour le développement de la société de l'information. «Le taux de croissance de notre pays pourrait augmenter de plus de 1% par an s'il investissait plus dans les NTIC. Ce sujet doit donc être traité comme une priorité nationale», conclut Renaissance Numérique.
La belle affaire, depuis quand en France, la nomination d’un ministre permet la résolution d’un problème ? Depuis Laurent Fabius et le Plan informatique pour tous en 1985, chaque gouvernement a nommé son « Monsieur nouvelle technologie ». Le dernier en date fut Laurent Sorbier qui sous le gouvernement Raffarin fut nommé Conseiller technique en charge de la société de l'information et des télécommunications au Cabinet du Premier Ministre (2002-2005). Monsieur Laurent Sorbier fut certes un garçon très sympathique mais voyez-vous, après des dizaines de colloques, de séminaires, de petits déjeuner presse, de buffets dînatoires, de voyages d'études, de frais de représentation, de rapports remis et non lus, le bilan est nul et nous avons encore perdu 5 ans.
Le club Renaissance Numérique rassemble entre autres: Mats Carduner, DG de Google France et Europe du Sud - Christophe Parcot, DG de Yahoo France - Catherine Barba, présidente de CashStore - Marie-Christine Levet, présidente de Club-Internet - Yseulys Costesn présidente de 1000Mercis - Pierre Kosciusko-Morizet, PDG de Price-Minister - Jean Marc Steffann, directeur des portails d'Orange - Benoît Cassaigne, directeur du département Internet et téléphonie mobile de Médiamétrie -Jérôme Adam, maître de conférence à l'IEP Paris - Christine Balagué, maître de conférence à l'université des sciences et technologie de Lille1.
Autre grande surprise à la lecture de la composition de ce club au demeurant très respectable, comment des représentants de grands groupes privés comme Google, Yahoo, Orange, en appellent-ils encore à l’aide l’état français ? Alors qu’il serait plus simple de demander à Orange d’accélérer le dégroupage, d’exiger des hébergeurs comme NOOS ou ALICE de mieux traiter leurs clients, de demander aux éditeurs de logiciels de ne faire qu’une licence et de demander aux fabricants américains d’ordinateurs de ne pas surcoter de 30% leurs prix en Europe. Chacun à son niveau peut permettre une diffusion du net et des usages sans passer par la puissance publique. Si chacun de ces grands dirigeants convertissaient une partie des sommes consacrées à la publicité, en matériels pour les écoles, en dotations et en formations pour les personnes âgées, cela améliorerait le paysage numérique français sans alourdir les déficits. C’est aussi cela être une entreprise citoyenne…
Pour conclure, le sentiment que j’ai eu à la lecture de ce livre blanc, est qu'il a été écrit en 2002 et que les rédacteurs ont encore une vision trop orientée informatique et ordinateur. La révolution numérique que vivent les Français est peuplée d’objets communicants, nomades, leur permettant d’être créatif. Les NTIC ont depuis longtemps perdus leur N, désormais il faut intégrer tous les objets numériques, appareils photo, lecteurs mp3, mobiles, console de jeux vidéos, ordinateurs portables, qui constituent les vecteurs d’une nouvelle culture.
Quelques sources pour éclairer le débat :
Source : Médiamétrie, mars 2005
La France est le pays qui a enregistré la deuxième plus forte croissance du taux d'équipement des foyers en haut débit en 2004 : + 94%. Elle se place désormais au 3 ème rang du classement européen en matière de taux d'équipement haut débit et a rattrapé, en même temps que le prix de l'ADSL a fondu, son retard sur ses voisins anglais et allemands.
Enquête 2005-2006 de BNP Paribas Lease Group. (25/01/2006)
89 % des PME françaises sont connectées en haut débit Si les PME-PMI hexagonales se distinguent par un taux de pénétration élevé de l'Internet rapide, elles sont en retard en matière de sites Web, révèle l'enquête.
Si 2005 reste une année de belles performances en termes d'évolution des TIC dans les petites structures entrepreneuriales françaises, une ombre subsiste tout de même au tableau : les PME hexagonales accusent un net retard en matière de détention d'un site Web. En 2002, 52 % des PME interrogées disposaient d'un site Internet. C'est toujours le cas trois ans plus tard. La détention d'un site stagne en fonction de la taille salariale : 46 % pour les PME de moins de 20 salariés, 61 % de 21 à 49 salariés, et 80 % pour les 100 à 200 salariés. Un constat d'autant plus désolant que parmi les entreprises disposant d'un site Web en France, 42 % ont effectué des ventes, directement ou indirectement, par ce biais en 2005, contre 34 % en 2004. En comparaison, 82 % des PME allemandes disposent d'un site Web, 77 % des PME italiennes et britanniques, et 65 % des PME espagnoles.
PC : l’Europe devant les Etats-Unis
Posté 09.10.2006 à par Christophe Laporte
D’après une étude réalisée pour la Commission européenne, le taux d’équipement des foyers européens en PC est supérieur à celui des Américains. L’année dernière, 72 millions de ménages européens avaient un PC chez eux, contre 67 millions aux États-Unis. En 1997, l’écart était de dix millions en faveur des États-Unis. En France, le taux d’équipement constaté (57 %) est légèrement au-dessus de la moyenne. Concernant l’accès à Internet, la France est dans une situation paradoxale. L’hexagone est dans le ventre mou avec 40 % des foyers qui ont un accès à Internet. Par contre, elle est en très bonne position en ce qui concerne le haut débit avec un taux d’équipement de 34 % soit 11 points de plus que la moyenne européenne. De plus, elle est en tête en matière de Wi-fi. Un ménage sur deux qui est relié à Internet avec une ligne haut débit, dispose d’un routeur sans fil.