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Eric Leguay, ma vie numérique

Le présent n'est que le futur passé...

Jouer c'est jouir

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Je me suis demandé si les organisateurs de ce colloque, ne visaient que les geeks sans vie, pour organiser dés 9h un samedi, une discussion passionnée sur le jeu ? J'ai donc laissé la femme de ménage s'occuper de l'appartement avec l'interdiction formelle de toucher à mes jeux vidéos pour me rendre à Port Royal où la 3G ne passe pas. L'architecture hispano-mauresque du lieu invitait déjà les participants à recréer une partie de FPS, car si nos vies n'étaient qu'un jeu, nous aurions déjà tous revêtus nos armures pour nous battre dans les travées avec nos armes lasers.

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Plus sérieusement, l'idée même d'organiser un colloque autour du jeu à l'ère numérique est plus que salutaire après de nombreuses vagues de dénigrements, d'amalgames, d'insultes, de rejets, des joueurs et de leurs pratiques. Le « BadTroll » des dernières semaines suite à l'article du Point signé par Glaire Gallois (surnom officiel donné par la communauté des joueurs) est édifiant. Le rôle de l'Université est aussi d'éclairer les conscience et par l'observation, l'analyse et la critique de montrer ce qu'il en est sans jugement ni morale. Rendons hommage aux organisateurs d'avoir permis d'entendre le point de vue de sociologues, de philosophes, de praticiens autour de la « ludification » massive de notre société.

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Pourtant Bernard Darras, organisateur de l’événement nous avoua son désintérêt pour le jeu vidéo. Il n'y a pas chez lui ni rejet, ni dégoût, juste une absence de temps ou de vision de la chose. Le jeu fait partie de son enfance et n'a donc plus sa place dans sa vie bien remplie d'adulte. Ainsi pour étudier le jeu, il faut à la fois étudier les joueurs et les non joueurs. Ce ne fut pas le cas de la majorité de l’assistance, passionnée et joueuse. Nous avions sorti pour l'occasion notre artillerie numérique, faite de smartphones, tablettes et laptops. Nous sommes désormais munis massivement de compagnons numériques aux fonctions magiques et ludogènes. Nous sommes irrémédiablement attirés par leur lumière et leur éclat comme des papillons sur un écran Retina.

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Car le numérique remplit dans notre société le rôle magique de la baguette des fées. Grâce à tout ces objets connectés nous pouvons télécommander notre environnement. Le Monde se télécommande à distance du bout du doigt, du bout de nos smartphones. Il n'y a donc qu'une mince pellicule de verre organique qui sépare ces objets quotidiens de fonctions ludiques. L'idée d'une vie qui ne serait qu'un gigantesque jeu vidéo commence à prendre du sens, car toute action humaine pourrait se convertir, s'échanger, en ORB. Les adeptes de la philosophie de la déconstruction basent comme équation que si le Monde est un jeu, alors les règles n'existent pas, les joueurs ne se connaissent pas et l'on accepte le Hors-jeu.

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Dans l'imaginaire populaire, le joueur ado boutonneux, NoLife, à la masculinité militarisé, prend sa source dans les premiers modèles de joueurs américains souvent majeurs fréquentant les bars, buvant de la bière et jouant sur des jeux d'arcades. La réalité est actuellement bien différente et beaucoup plus large, pour toucher toutes les catégories et tout les sexes. Le jeu peut même prétendre au statut d'art tant il est devenu une nouvelle forme d'expression et de création, à l'image du cinéma par exemple. Culture, contre culture, détournement, parodie, machinima, héros, les nouvelles écritures numériques offrent aujourd'hui une telle variété d'interactions, de découvertes et d'émerveillement qu'ils sont une alternative plus séduisante que les loisirs passifs.

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Alors pourquoi jouons nous ? Stéphane Vial répondra d'un jeu de mot : pour le « Playsir ». Jouer c'est jouir, c'est reproduire, anticiper, braver l'inconnu, prendre des risques sans sortir les griffes. A regarder ces vidéos sur YouTube montrant des chats jouant sur un iPad, on est convaincu de la fonction ludogène et du caractère irréversible du phénomène. Nous en sommes arrivé à un tel point qu'il faudra bientôt songer à adopter un chat avant d'offrir une tablette, pire sans doute offrir directement un iPad à son chat. Quelque chose nous échappe que l'on ne comprend pas entre la magie technologique qui nous entoure et cette envie irrémé...diable de s'en emparer.

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Car le jeu a une part de divin, comme Dieu, nous jouons. Ne sommes nous pas à la fois des marionnettes de Dieu et du Malin ? À notre tour de prendre notre revanche d'humain en s'émancipant du divin, contrôlant par notre puissance numérique ces êtres de pixels, explosés en de « Dissolves » particules électrisantes. Tuer son prochain, créer la vie, tricher, frapper, tuer des cochons en lançant des oiseaux et cramer des lapins même crétins, mourir pour de faux et recommencer la partie, dans une vie numérique, sont des exutoires de nos vies où il ne passe pas grand chose. Le jeu vidéo est blasphématoire et transgressif et c'est pour cela que l'on joue.

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Certain y voit un danger de trop rester dans le jeu, à l'image du discours de notre Curé du Numérique préféré, j'ai nommé Serge Tisseron, qui évoque les dangers de ces « Mondes virtuels ». Depuis l'invention de la photo puis du cinéma plusieurs générations sont désormais bombardés de stimuli visuels. Les écrans se multiplient, nous n'en sommes qu'au début d'une révolution technologique qui avec l'avènement des écrans organiques, verra la généralisation, d'écrans souples aux surfaces infinies. Ces mondes ne sont pas virtuels mais bien réels embarqués et prisonniers dans nos petites « Boites de Pandores » personnelles réapparaissant au gré de nos envies et de nos fantaisies comme des petits dieux que nous sommes.

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Avec tout cela est ce que le joueur est heureux de jouer ? Il faut l'avouer qu'à bien l'observer, la joie ni l'extase ne transparaît du joueur, il a même souvent l'air éteint et abattu. Pire entre deux moments intenses, il s'ennuie, il s'ennuie même souvent. Alors pour tromper son ennui, il fréquente les LAN pour aller « puer » collectivement avec ses amis joueurs et jouer entre les temps morts. Le jeu n'est pas si fun que cela, car comme les enfants qui s'investissent énormément dans leurs jeux, les joueurs jouent très sérieusement parfois tristement avec une conscience de joueur pouvant dépasser leur conscience professionnelle de livreur de Pizza.

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Le jeu numérique peut aussi être poétique, et cette journée, c'est achevée par les superbes réalisations d'Etienne Mineur. Détourner les technologies numériques pour provoquer des effets saisissants et enchanteurs sont les ingrédients de son alchimie ludique. Souffler sur un ballon de papier, redonne à nos cœurs la petite flamme d'enfance que l'on essaye de rallumer en permanence. La technologie réinvente la lanterne magique, les mondes imaginaires, la peur du noir, les parties de dominos, les duels avec un bâton, les marelles à la craie, les cow-boys, les princesses, les châteaux forts de cartons, les indiens et les chevaux de bois.

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W
<br /> Je vous alisse jsute une adresse où un autre OMNSH parle du Jouir :<br /> <br /> <br /> http://www.youtube.com/watch?v=uWdlDxwSYLQ<br />
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