Secret Défense – Dans la peau du Général de Gaulle

Le COVID m'a fait sombrer dans une faille spatio-temporelle où les dates, les lieux, les événements s'entrechoquent, se croisent, se mêlent, se répondent et résonnent dans ma bouche avec les mots d'un autre. Parce-que le destin de ma morphologie fut d'être fréquemment comparé au plus illustre des Général de France, me voici dans la peau du Général de Gaulle. Étrange coïncidence que de croiser à mon âge des événements de sa vie publique, des gestes, des postures politiques, des envolées lyriques dont il avait le secret au service d'un spectacle immersif. Me voici revêtant l'habit qui pour d'autres était trop grand et qui me va comme un gant. Dans les pas du Général dont je regarde la gestuel et qui est si éloigné de moi, si différent mais si inspirant, si théâtral, si unique, si flamboyant.

Pas facile de jouer le rôle du grand homme, surtout quand on n'a pas de références vécues puisqu'en mai 1968 je n'avais que 4 ans.  Il est donc assez caricatural de singer ces postures théâtralisées, ces "Je vous ai compris", ces "Paris libéré, mais Paris Martyrisé" ou "Vive le Québec libre" les bras en l'air en grand costume d'officier. Mon premier travail pour ce spectacle « Secret Défense » fut de m'inspirer de sa prestance et de sa gestuelle. J'ai beaucoup regardé les albums de famille à Colombey, ou il est installé en toute rectitude sur son fauteuil.  Chez lui, il n'est pas en représentation , comme dans ce spectacle où le spectateur viendra discrètement assister à une entrevue.

De Gaulle parfois se résume à un tronc dont seuls les bras bougent aux jambes presque immobiles. de Gaulle est avant tout un militaire et en 1959 il est déjà plus âgé que les habituels films vus et revus, sa démarche moins vive et plus apaisée.  C'est un chêne qui se déplace, et sa voix est à l'image, puissante, dans un français un peu surannée et désuet dans son élocution. Il y a de la connivence avec Eisenhover, du sous-entendu où il n'est pas besoins comme entre deux vieux amis de beaucoup parler pour se comprendre sans oublier des petites piques bien senties souvent à l'adresse des Britanniques.

La ponctuation va revêtir une importance capitale comme ses silences distillés avec subtilité. J'aime cette phrase qui illustre bien l'esprit de cette rencontre. "Croyez moi, la France n'a pas perdu, comme les Britanniques, le goût pour l'excellence", la France est certainement le mot que nous prononcerons le plus avec des silences appuyés et une rondeur en bouche avec sa "noble bonhomie". En pleine guerre en Ukraine, les répliques sonnent terriblement justes. Que dire de l’élection Présidentielle que nous vivions en direct des répétitions, quand la Vième République qu'il avait voulu tellement monarchique ne répondait plus aux aspirations des français du XXIe siècle ? Et cette affrontement frontal avec la Russie ? Ces missiles lancés ? La Bombe atomique ?